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mardi 18 mars 2008

LE MEDAD

LE MEDAD (1)

"Ne faisons rien d'idiot" George W.Bush

Le MEDAD s'apprête à publier son organigramme.Ce n'est pas une mince affaire. Conçu dans la chaleur communicative des elections de mai 2007, ce nouveau ministère regroupera trois ou quatre ministères ou grands services chargés de l'energie, des matières premières, des transports, de l'équipement, de la mer, de l'espace rural, de l'aménagement du territoire et ...et de l'écologie.

Il faut pouvoir faire travailler ensemble de grands corps d'ingénieurs de l'Etat comme les Mines, les Ponts et Chaussées, le Genie Rural, le Genie Maritime, les Ingénieurs des Travaux Publics. Corps efficaces et internationalement réputés, ayant depuis longtemps fait leurs preuves pour la construction de routes, de voies ferrées, de centrales electriques etc...Aussi de leur volonté d'en faire encore beaucoup, et de leur liberté de parole dans ces domaines.
Il leur sera d'ailleurs toujours demandé de construire des routes, des usines etc... mais sans doute autrement.

Après tout il est démocratiquement normal que les grands corps techniques (Armée, Magistrature, Université, Medecins hospitaliers etc...) s'expriment sur leur domaine d'action puis reçoivent de la collectivité nationale les normes juridiques et les moyens financiers dispensés par la Nation. Et, comme aujourd'hui pour l'écologie, la Nation impose déjà certains choix aux techniciens du domaine spécialisé et aussi aux autres : l'Université doit respecter la sécurité nationale, l'Armée doit respecter les droits de l'homme, les Hopitaux doivent assurer une formation etc...Et tout le monde, bien sûr, passe en principe sous les fourches équitables de la Loi et du Budget.

Au MEDAD, la contrainte écologique (2) sera d'abord introduite de manière raisonnable à partir de services de recherche et de formation transversaux. Comme dit Pierre Dac " Rien de sert de penser, d'abord, il faut réfléchir". Les solutions écologiques de café du commerce peuvent s'avèrer illusoires ou dangereuses: carburants verts, eoliennes, autoroutes maritimes parait-il plus polluantes que les files de camions, rejet du nucléaire qui fait pourtant de la France l'un des meilleurs élèves dans la lutte contre l'effet de serre...

Et aussi l'écologie sera "politique" puisque tout sera négocié en permanence dans un Pentateuque d'aréopages représentant l'Etat, les collectivités territoriales, les syndicats, les patrons...et les associations aussi représentatives que possible et qu'il s'agit de faire passer de la contestation à la participation. Vaste programme...

L'organisation même du ministère, au début entièrement pensée par Alain Juppé, clair dans ses bottes et revigoré par son exil canadien, a été ensuite retardée par un Jean Louis Borloo plus négociateur.Il semblait logique (mais peu habituel en politique) de savoir ce dont on devait parler avant de décider qui devait le dire et comment. Et ce fut l'objet d'un pittoresque Grenelle de l'Environnement où les poètes barbus cotoyèrent les puissants représentants du MEDEF et la vieille garde des Mineurs qui meurt mais ne se rend pas.

Pour l'organigramme, une solution assez curieuse consiste à affecter à chaque grande direction la responsabilité d'un objectif qualitatif: l'Energie veillera sur le climat, l'Urbanisme protégera la nature etc...Toute autre répartition serait sans doute aussi pertinente, et le mieux serait sans doute de confier toutes les préoccupations ecologiques à toutes les directions du ministère. De même qu'elles doivent toutes respecter la Loi, les Droits de l'Homme etc.....

Donc ceci n'est pas simple. Au prix exorbitant où on rémunère les managers et consultants pour vendre des salades frelatées, on se demande combien il faudrait payer les fonctionnaires qui affrontent ce genre de difficultés.

Aux difficultés propres au sujet s'ajoutent bien sûr d'autres contraintes issues de la nature des choses ou de l'imagination des conseillers en communication.

- comme les Droits de l'Homme en 1789, l'Ecologie doit aujourd'hui servir à la promotion du modèle culturel français et permettre ainsi à nos hommes d'état de faire la leçon aux autres. Nos partenaires étrangers adorent ça et nous adressent en retour une immense gratitude.

- le MEDAD, deuxième employeur public avec 70000 agents , devra lui aussi liquider un certain nombre de fonctionnaires (en principe un sur deux) dont beaucoup de hauts gradés qui entreront en concurrence avec les politiciens battus aux elections dans la recherche des placards de la République ou de la retraite anticipée.

- la LOLF, autre ardente obligation, reconstruit à sa manière la gestion administrative et financière des unités administratives. On ne sait pas encore quand ou comment le nouveau MEDAD appliquera cette deconstruction de la langouste.

- une consigne formelle a été donnée au MEDAD: ne rien faire qui touche à la compétitivité des entreprises françaises. C'est un peu comme si la France , signataire pour raisons vertueuses, des accords anti-corruption, fermait les yeux sur la corruption pour raisons de patriotisme économique.

- enfin une consigne implicite en ces temps difficiles: ne pas toucher au pouvoir d'achat des Français, dangereusement ébranlé par des mystères macrofinanciers qui nous dépassent et par des bavures financières américaines à répétition.
Et aussi par l'addiction à un demi-siècle de surconsommation alimentée par le credit revolving, une publicité omniprésente parce que defiscalisée. Et defiscalisée parce qu'il faut faire marcher la conjoncture et le commerce fournisseurs de TVA, alors qu'on aurait pu fonder la croissance - plus sainement et plus écologiquement -sur l'investissement à long terme, la recherche , la formation, la protection de l'environnement.Habitudes de confort matériel superflu consolidées par les exemples venus d'en haut des richesses et modes de vie des parvenus mafieux, des patrons-voyous, du show business et de certains hommes politiques. Et dont il sera bien difficile de se défaire par la simple vertu...

- peut-être en relation avec ce qu'on vient d'écrire, une contrainte supplémentaire vient de survenir. Depuis le 16 mars au soir, les deux tiers des territoires d'application du développement durable- régions, départements, communes- sont passés aux mains de groupes politiques qui ne partagent certes pas la ou les visions du chef de l'Etat qui a engagé ce remaniement nécessaire mais compliqué.

Enfin, depuis quelques mois, certains méditent un proverbe allemand " Il y a trois choses qu'on commence sans avoir comment elles se termineront : un amour, une carrière, une révolution" . Et qui s'aperçoivent avec inquiétude que le chef d'Etat récemment élu aborde de front ces trois inconnues, avec l'enthousiasme du jeune Louis XIV danseur de ballets à la gloire du Roi-Soleil.

Personne ne sait comment tout cela finira, pour l'écologie et pour le reste.


(1) Il ne s'agit pas d'une officine factieuse affiliée à Al Qaida, mais du Ministère de l'Ecologie et du Developpement Durable
(2) Voir aussi: ENVIRONNEMENT ECOLOGIE
GEOPUBLIC: MANAGEMENT PUBLIC

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